Terminologie française et allemande dans le domaine du climat et de l'énergie
Résumé
La crise climatique et la crise énergétique sont toutes deux des phénomènes globaux qui alimentent les débats dans la société, incitent les spécialistes à développer des solutions et obligent les autorités à prendre des mesures. C’est pourquoi dans toutes les langues qui servent à communiquer sur ces phénomènes, la terminologie correspondante s’amplifie constamment. Une multitude de termes apparaissent pour la première fois en anglais, langue universelle des sciences, des technologies et de la diplomatie internationale. Par la suite, ce sont souvent ces termes anglais qui servent de base pour la création de terminologie dans d’autres langues.
Celles-ci peuvent choisir parmi plusieurs procédés lexicaux : Le terme de la langue source peut être adopté en tant que mot d’emprunt qui est adapté par la langue réceptrice (cf. Sablayrolles/Jacquet-Pfau/Humbley 2011 : 2 sv., Kiegel-Keicher 2022b : 56 svv.), comme le terme allemand Fracking (< angl. fracking). Comme alternative, le terme original étranger peut servir de modèle pour la création d’une nouvelle forme à l’aide de matériau lexical interne et conformément aux principes de formation internes en calquant le terme de la langue source. Le « calque par traduction » (Spenler 2015 : 30, cf. Haugen 1950 : 220) reproduit le terme original en le traduisant littéralement (fr. gaz naturel liquéfié (GNL) < angl. liquefied natural gas (LNG)), tandis que le « calque par transposition » (Spenler 2015 : 30, cf. Betz 1949 : 27) le reproduit d’une façon plus libre (fr. bouquet énergétique < angl. energy mix). En dehors des mots d’emprunt et des calques existent, bien sûr, des termes qui sont créés indépendamment et n’indiquent aucune relation étymologique avec le terme anglais correspondant (fr. parc éolien vs. angl. wind farm). On peut constater, néanmoins, que la plus grande partie des termes employés par des langues comme le français et l’allemand prennent le modèle anglais pour base, en choisissant l’un des procédés lexicaux décrits.
Dans cette contribution nous comparons le français et l’allemand en ce qui concerne la création de terminologie dans les domaines de l’énergie et du changement climatique. Nous analysons les procédés de formation respectifs en posant l’hypothèse que les aspects distinctifs suivants constituent des facteurs décisifs quant à la proximité ou bien l’indépendance des termes résultants vis-à-vis du terme originel anglais :
Premièrement, l’anglais et l’allemand ont en commun, grâce à leurs systèmes grammaticaux d’origine germanique, des principes de formation (p. ex. prédétermination et composition asyndétique) qui s’opposent à ceux du français en tant que langue romane (postdétermination et composition majoritairement syntagmatique).
Deuxièmement, le français, pour sa part, partage avec l’anglais une partie considérable de son lexique, puisque ce dernier a emprunté, pendant des siècles, une grande quantité de gallicismes. En troisième lieu, la création de terminologie en France est dirigée et contrôlée par un dispositif ministériel, institution qui n’existe pas en Allemagne où ni la formation ni l’usage du langage spécialisé n’est officiellement réglementé.
En tant que corpus, nous utilisons le site internet FranceTerme, base de données régie par le ministère de la Culture, qui enregistre la terminologie créée par la Commission d’enrichissement de la langue française (cf. Kiegel-Keicher 2022a : 129 sv.). Sur cette plateforme on trouve également les termes anglais correspondants. La terminologie allemande, qui s’est créée à partir des mêmes modèles anglais, est confrontée aux lexèmes français selon deux aspects : Nous les comparons, d’un côté, quant aux procédés de formation lexicale internes (perspective morphologique), et de l’autre côté, en ce qui concerne leur relation étymologique avec le terme anglais correspondant (perspective de la linguistique de contact). Les résultats nous servent à établir une typologie contrastive de la création de terminologie des deux langues.